Son visage au sourire malicieux était familier à tous ceux qui fréquentent la Résistance iranienne. Elle était là, toujours au premier rang, dans toutes les manifestations, tous les rassemblements, sit-in, actions, grèves de la faim, dans le froid de l’hiver ou la chaleur de l’été, tant à Paris, qu’à Genève devant l’ONU, où dans plusieurs capitales européennes. C’est avec beaucoup de tristesse et de recueillement que ses amis français et iraniens ont assisté à sa mise en terre, le mardi 28 septembre 2010, au cimetière intercommunal de Puiseux-Pontoise, puis à l’hommage qui lui fut ensuite rendu simultanément au siège du CNRI et à la cité d’Achraf où réside une de ses filles.
Emportée par une crise cardiaque à l’âge de 87 ans, Mme Mohtaram Ije’i Kouchali, connue sous le nom affectueux de « Mère Kouchali » est une figure de proue de la Résistance. Originaire de Lahidjan, dans le nord de l’Iran, elle grandit dans un milieu aisé qui, attaché à la liberté, s’oppose vite au chah et mène aux cotés de ses enfants membres de l’Organisation des moudjahidine du peuple, très populaire alors dans le nord de l’Iran, de nombreuses actions contre la monarchie.
Après l’arrivée au pouvoir des mollahs et l’instauration progressive de la dictature religieuse, Mère Kouchali, musulmane progressiste et tolérante, dénonce autant que possible le fascisme qui s’installe. Elle est l’objet de persécutions et de harcèlements. Les gardiens de la révolution arrêtent et exécutent quatre de ses fils ainsi que sa belle-fille – sur ses huit enfants. Dans le climat de répression très lourd de l’époque, elle devra enterrer l’un d’entre eux dans sa propre cour, le régime lui ayant interdit le cimetière de la ville. « Alors notre maison sera un sanctuaire des Moudjahidine » lance-t-elle en défi aux pasdarans.
Loin de l’abattre, ces pertes multiples la font redoubler d’énergie dans la résistance aux mollahs. Mais menacée à son tour d’emprisonnement, ce qui signifiait la torture et la mort, elle doit fuir le pays en 1983. Elle arrive en Espagne d’où après une brève halte, elle rejoint la France. Elle y restera jusqu’à sa mort, militante convaincue et passionnée, fustigeant sans relâche la dictature islamique, témoignant devant les médias pour dénoncer les violations des droits de l’homme en Iran, racontant le martyr de ses enfants et des 120 000 victimes de la répression.
La présidente élue de la Résistance iranienne, Maryam Radjavi, a salué dans un message le courage de cette Mère qui a su enseigner à plusieurs générations le refus de tout compromis avec les mollahs et la persévérance dans le combat contre le fascisme religieux.